Cabrel chez Heidegger : Rodolphe Burger et Olivier Cadiot - On n’est pas des Indiens c’est dommage
« …Et il nous est donné d’entendre, grâce à cette écoute, le chant de la terre, elle qui tremble et frémit, mais demeure hors d’atteinte du tumulte gigantesque que l’homme organise pour un temps sur sa surface épuisée. »
Il y a d’abord un patois, le welche ; plus qu’un dialecte, une langue, une musique, accrochée à une terre, celle des vallées des Vosges ; un chant de la terre en train de disparaître aussi sûrement que les cultures indiennes d’Amérique du Nord. Il y a ensuite Rodolphe Burger, Strasbourgeois d’origine et cet écrivain complice depuis des années, Olivier Cadiot, co-auteur avec lui de chansons de Kat Onoma, qui décident ensemble pour le festival Babel de l’été 1999 de créer une performance sur cette musicalité-là et sa disparition probable. Il y a enfin cet enregistrement, réalisé dans les studios de France Culture et qui retranscrit live, en mélangeant Folk américain et patois vosgien, chansons traditionnelles et boucles de sampleurs, chants Navajo et guitares électriques, l’expérience de cette rencontre ; celle de l’écrit et du chanté, de l’universel et du particulier, du passé et du présent sur ce sol qui se dérobe vertigineusement à mesure que progresse la maîtrise technique du monde. Audacieux et unique, le projet parvient enfin à nos oreilles ravies, nous remémorant que « la langue tient ouvert le domaine où l’homme sur terre et sous le ciel, habite la maison du monde » et que « si nous perdons la terre, assurément nous perdrons aussi l’assise. »